La presse anglo-saxonne tentée par l’enquête peopolitique
Le 14 janvier 2014, 580 journalistes, dont 200 venus de l’étranger, ont assisté à la conférence de presse donnée par le président français. L’événement promettait, à en croire les tabloïds britanniques, d’être sulfureux. Mais, François Hollande, qui s’est exprimé plus de deux heures dans une salle surchauffée, a refroidi les ardeurs des journalistes anglais et américains tentés par l’enquête peopolitique. Averti, il a quasiment muselé les journalistes étrangers.
» Albert Londres, pardonne-moi ! «
Les sévères boiseries qui encadrent la salle ne captent pas le discret brouhaha. Il fait trop chaud dans cette grande pièce confinée. « Où est le président ? » s’impatiente un grand homme à l’accent britannique. Le voilà enfin. Pendant deux heures trente, la salle restera suspendue à ses lèvres.
La presse hexagonale veut entendre de la bouche de l’intéressé qu’il est bien social-libéral. Le président, d’une pirouette, annonce qu’il ne s’étendra pas sur le sujet. Bonne transition vers d’autres questions, intimes, qui répugnent et tentent tout à la fois certains journalistes français. Le tweet du journaliste qui a posé la première question résume bien la situation : «Albert Londres, pardonne-moi !».
Hypocrisie ou remords ? « La presse est soumise à un dilemme », explique le sociologue Gérard Bronner, » comment respecter l’étanchéité entre vie publique et vie privée quand le concurrent transgresse ce principe ? » Y a t-il des règles de déontologie à fixer ?
La presse anglo-saxonne dans une logique de procès
Les Britanniques et les Américains n’ont pas tant de scrupules. Ils se sont placés d’emblée dans une logique de procès. Les questions que les compatriotes de François Hollande estiment voyeuristes relèvent à leur yeux d’un effort d’investigation, dûment construite sur le modèle d’une enquête judiciaire, justement.
A ses yeux, la situation maritale du président a un impact sur la stabilité de son mandat, étant donné le rôle politique tacite qui est conféré à la compagne/au compagnon d’un(e) chef d’Etat. Flouter le visage de la première dame, c’est tromper les français, en ne leur disant pas qui co-dirige la Nation.
Non, plaident les journalistes anglo-saxons, nous ne faisons pas de la Peopolisation de la vie politique, comme veulent bien l’entendre les médias français, mais d’un travail d’investigation. Rien de plus déontologique, contrairement à ce que pense la presse française.
Il ne faut pas oublier que traditionnellement, les anglo-saxons considèrent la presse comme le quatrième pouvoir d’une démocratie.
On peut toutefois entretenir des doutes quant au souci du Sun d’ouvrir un débat sur l’autorité politique et la transparence du pouvoir, lorsque le quotidien exhibe une photographie de l’amante supposée du président de la république française…nue.
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