Journée internationale de la femme : et si on commençait par les médias ?

La journée internationale de la femme du 8 mars 2014 est célébrée par les médias. Pourtant, même dans les professions de la presse et de l’audiovisuel, l’égalité entre hommes et femmes peine encore à se traduire dans les faits.

Quarante ans d’efforts pour l’égalité entre hommes et femmes

En 1977, la journée de la femme fait partie des 87 journées internationales reconnues ou initiées par l’ONU. Le jour banalisé est l’occasion de faire valoir le droit à l’égalité et d’établir des bilans sur la situation des femmes dans la société.

Le 8 mars, c'est toute l'année, rappelle le gouvernement français.
Le 8 mars, c’est toute l’année, rappelle le gouvernement français.

Presque quarante ans plus tard, l’ONU continue de s’efforcer à démontrer l’avantage pour touts que représente la prise en compte de l’égalité entre hommes et femmes dans toutes les strates de la société :

« Les pays dans lesquels les femmes sont traitées sur un pied d’égalité avec les hommes jouissent d’une meilleure croissance économique. Les entreprises qui comptent des femmes parmi leurs dirigeants affichent de meilleurs résultats. » affirme ce 8 mars M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies.

Dans les Etats qui revendiquent le respect de l’égalité entre hommes et femmes, l’égalité de droit n’a pas encore basculé vers une égalité de fait. Outre les cas récurrents de harcèlement, de remarques misogynes et sexistes, les femmes sont contraintes de faire face quotidiennement à une injure plus insidieuse : la valeur de leur travail est, à priori, jetée en discrédit.

Dans ces pays, l’image des femmes véhiculée par les médias reste presque systématiquement négative, exception faite des dossiers consacrés à des femmes qui agissent de manière extraordinaire.

La femme ordinaire, il y en a deux : une qui tient un aspirateur dans la main, une autre qui porte des stiletto aux pieds. A n’exister que par les objets qui les accommodent, les femmes sont elles-mêmes identifiées entièrement à des accessoires. Femme-objet, ou bien, au mieux, figurine. Dans les deux cas, la femme, réifiée, est réduite à un rôle superflu.

Ce 8 mars est aussi le jour où sur les réseaux sociaux, se déverse une fange d’injures sexistes à l’endroit des femmes. Souvent sous-couvert d’ironie.

Vu sur Facebook, une mention : "bonne journée de la femme", légendée d'un appareil ménager.
Vu sur Facebook, une mention : « bonne journée de la femme », légendée d’un appareil ménager.

Cette année, les récentes invectives au sujet des « Gender Studies » en France viennent ce mêler à ce galimatias.

Les représentations dégradantes de la femme, relayées par les médias et les réseaux sociaux, alimentent le sexisme persistant dans le monde du travail.

Les femmes restent discriminées dans les professions des médias

L’initiative « Prenons la Une », lancée cette semaine sur Tumblr par un collectif de journalistes, fait apparaître les discriminations persistantes que subissent les femmes dans le secteur des médias, en France.

Les femmes dans les médias. L'exemple du VSD.
Les femmes dans les médias. L’exemple du VSD.

D’abord, ce constat :

4 journalistes sur 10 sont des femmes, mais elles représentent 54 % des pigistes et 58 % des CDD, selon les chiffres du 3 janvier 2014 de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels.

Puis, la récurrence des remarques sexistes au travail, qui montrent que le topos de la « femme objet » est loin d’appartenir au passé.

« Rendez-la sexy qu’elle soit agréable a regarder ! » s’est esclaffé le réalisateur d’une émission TV à une maquilleuse, à propos d’une de ses journalistes qui s’apprête à présente une chronique. « Le fond, ça ne devait pas l’intéresser… », s’indigne « Prenons la Une ».

Dans ce contexte, il arrive que les femmes intériorisent leur situation d’infériorité, et soient prêtes à emprunter un comportement schizophrénique pour réussir dans leur carrière. « On va prendre une voix d’homme pour mixer ton film, ça donnera plus de crédibilité », conseillait-on ainsi une à une réalisatrice free-lance qui avait pourtant bien fait son travail. Un propos tenu par une femme…

Interpellé sur la faible représentativité des journalistes femmes à des postes de direction, France Télévisions réagit : depuis les douze derniers mois, la part des femmes recrutées à des postes d’encadrement supérieur est déjà passé de 29% à 39 %. (France Télévisions).

Conséquence directe sur les programmes, et l’image de la femme véhiculée à la télévision : le groupe propose, pour la 2e année consécutive, une semaine spéciale « En avant toutes ! » sur l’ensemble de ses chaînes (France 2, France 3, France 4, France 5, France O, Outre-Mer 1ère et France 3 en régions). Les écrans se mobilisent pour offrir une programmation dédiée aux débats sur l’égalité, la parité, les violences et les stéréotypes.  »

Signe que les mentalités n’évolueront pas sans le concours des médias.

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Clara Schmelck
Clara-Doïna Schmelck, journaliste, philosophe des médias. Rédactrice en chef adjointe d'Intégrale - est passée par la rédaction de Socialter ; chroniqueuse radio, auteur, intervenante en école de journalisme et de communication (Celsa ...).

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