La concomitance de deux naufrages, un cargo entassant des milliers de migrants et un sous-marin habité par cinq milliardaires, a donné l’occasion de s’apercevoir clairement des critères politiques et médiatiques de ce qui fait évènement.
D’importantes moyens ont été déployés pour retrouver les 5 passagers du Titan, dont un milliardaire qui a payé 250 000 dollars. Dans le même moment, des milliers de migrants du chalutier qui a coulé au large des côtes grecques n’ont pas été secourus.
Les moyens déployés par les Etats pour rechercher quelques milliardaires disparus en mer et la mobilisation médiatique sont disproportionnés, en comparaison de l’indifférence face à la disparition de milliers de migrants en Méditerranée.
Ce qui fait évènement
Plus que le naufrage de la solidarité, c’est le naufrage du principe d’humanisme auquel nous assistons : il est attendu que les migrants, illégaux débarquant en masse, sans projets ni richesse, anonymes, ne soient pas secourus ; au contraire de milliardaires identifiés, et en tous points solvables(financièrement, sur le plan professionnel et intellectuel…).
Le curseur de ce qui fait évènement est déplacé : ce n’est pas le nombre de mort qui importe, mais l’identité des morts.
L’événement, c’est le sous-marin des cinq milliardaires, et non pas le bateau qui sombre avec des milliers d’hommes, femmes et enfants.
L’idée qu’une vie humaine n’en vaut pas une autre est entrée dans la façon de hiérarchiser l’information.
Emilie Rached
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